jeudi 19 décembre 2013

C'est bientôt Noël : quelques albums jeunesse... pour les grands

Je vous disais hier que j'ai découvert avec joie et admiration la grande qualité de certains albums "jeunesse" publiés aujourd'hui. À tel point que, bien que je vais cesser pour un temps d'en acquérir professionnellement, j'ai bien l'intention de garder un œil attentif sur le marché. Et d'en acheter quelques uns pour mon usage personnel...
Parce que, au final, qu'est-ce qu'un album, dans le meilleur sens du terme ? C'est une belle histoire, qui fait réfléchir, avec des illustrations incroyables dignes des plus grands peintres.
Alors, s'il vous manque encore quelques cadeaux de Noël, pourquoi ne pas offrir un bel album ? Oui, oui, même pour un adulte ! Laissez-moi vous proposer mes préférés...

Plein Soleil, Antoine Guillopé (Gautier-Languereau)


Tous les livres d'Antoine Guillopé sont très beaux, mais celui-ci est particulièrement cher à mon cœur. Des pages noires découpées se superposent à des pages blanches et la savane naît sous nos yeux, tout en délicatesse, comme par magie. Il faut le voir pour le croire : quand je l'ai reçu dans l'une de mes commandes, pour moi, ça a été le coup de foudre immédiat.
À noter que le détail des découpages impose de le manipuler avec précautions : gardez-le entre vos mains d'adultes, et laissez les mômes à leurs bouquins en carton !

Brindille, Rémi Courgeon (Milan)


Brindille, c'est un conte féministe. Ai-je besoin d'en dire plus pour que vous couriez le lire ? Bon, d'accord. C'est l'histoire de Pavlina, que tout le monde appelle Brindille et qui en a marre de se taper toutes les tâches ménagères car elle perd à la bagarre contre ses frères. Alors elle apprend à taper fort. C'est une belle métaphore sur l'adolescence, accompagnée de très belles illustrations avec plein de choses à remarquer à l'intérieur, même à la douzième lecture (oui, oui, je confirme). Et puis la couverture amovible fait aussi poster, du coup, double cadeau !

ABC bestiaire, Janik Coat (Autrement)


Comment ça ? Un abécédaire dans mes recommandations d'albums pour adultes ? Vous connaissez tous votre alphabet ! Mais, comme souvent dans les abécédaires, ce n'est pas l'alphabet qui est intéressant mais tout le reste.
Comme dans de nombreux autres abc, l'auteure a décidé d'associer à chaque lettre un animal. Mais, contrairement à tous les autres abc, Antonin l'âne ne s'en va pas pour laisser place à Barbara la baleine. Il reste brouter dans un coin et est bientôt rejoint par une foultitude d'animaux qui n'en font qu'à leur tête et se baladent de page en page... Un peu comme un "où est Charlie" puissance 26, on va se demander ce qu'ils vont bien pouvoir inventer à la page suivante, et se mettre à chercher où se cacheront Émile l'escargot, Gaby la Grenouille et leurs copains...

Et, oui, on finit par s'amuser comme un gosse !

mercredi 18 décembre 2013

Albums jeunesse : des éditeurs aux enfants


C’est la troisième année que je me rends au salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil et c’est toujours un vrai plaisir. J'ai commencé sans rien connaître de cette littérature particulière que mes souvenirs d'enfant et j'ai découvert avec émerveillement sa diversité et la qualité immense de certains de ses ouvrages. C'est donc avec d'autant plus d'intérêt que je profite de toutes les occasions pour en apprendre plus sur ce champs particulier de l'édition française.
Cette année, j’ai assisté à deux conférences particulièrement intéressantes : « Quand les éditeurs de jeunesse soufflent leurs bougies ! » avec Emmanuelle Beulge de Sarbacane, Christine Morault de MeMo, François David de Motus et Natacha Derevitsky de Pocket Jeunesse ; et « Quels livres fait-on lire à l'école maternelle ? » avec Stéphane Bonnéry (maître de conférences en sciences de l'éducation à Paris 8) et Francette Popineau (secrétaire nationale SNUipp-FSU et professeure des écoles).
Ce qui suit n’est pas une retranscription mot à mot de ce qui s’y est dit, mais un « mash-up » d’une partie de mes notes prises au cours de ces deux conférences sur le thème (assez large) de l’album jeunesse et de son accessibilité pour son public cible : les enfants.

L'édition jeunesse aujourd'hui

Les éditeurs de la table ronde étaient tous d’accord sur au moins un point : le papier peut être contemporain et les livres sont des objets actuels. L’une des caractéristiques importantes de l’album, c’est sa matérialité : ce n’est pas qu’une histoire, c’est un objet et son format importe. Pour Memo ou Sarbacane par exemple, faire un objet de qualité est un objectif important car cette qualité matérielle touche directement le petit enfant.
Il semblerait d’ailleurs que, d’après les indicateurs américains, le livre numérique commencerait à stagner. En France, d’après le SNE, il ne représenterait toujours que 2 ou 3% des parts de marché. Le livre papier reste donc primordial, en particulier du côté des albums.
D’autre part, la période étant économiquement charnière, la question, pour les éditeurs indépendants, est de ne pas surproduire : chaque livre doit être indispensable. Chaque album fait donc l’objet d’une recherche de création, on porte une grande attention à la qualité artistique, on cherche à aborder des thèmes importants, éventuellement avec humour. Chez Sarbacane, le texte prend aussi une place toute particulière car ses éditeurs considèrent qu’il s’agit du « parent pauvre » de l’album et essayent de le mettre en avant. Le marché français s'avère divers et animé, avec de nombreux éditeurs idéalistes, ce qui est possible car il s’appuie sur une politique de lecture.
On peut remarquer que les albums « complexes » (illustrations ambitieuses, trames narratives complexes) produits aujourd'hui par les éditeurs indépendants témoignent particulièrement de l'évolution de la littérature jeunesse par rapport aux « livres d'images » (où l'image ne faisait qu'illustrer le texte) du siècle dernier.
Au final, si le fond et l’image sont intéressants, il ne devrait pas y avoir de limite d’âge pour lire un album. [Ce avec quoi je suis particulièrement d’accord… Allez donc demander à votre bibliothécaire jeunesse le plus proche ses albums préférés, il y a de vrais perles : de vrais ouvrages d'art avec des histoires intelligentes et bien dites.] Chez Sarbacane, il y a d’ailleurs des collections d’albums pour une large gamme d’âges, de la naissance à 12-14 ans. Cet éditeur cherche à ce que ses albums soient accessibles à tous, avec une certaine simplicité au premier abord, mais aussi plusieurs strates en dessous, afin que chacun puisse y trouver son compte.

Une littérature accessible pour son public cible ?

Cette question de l’accessibilité est au cœur du travail de recherche de Stéphane Bonnéry. En effet, l’appropriation des ouvrages les plus complexes par les enfants n’est en fait pas spontanée. Elle repose principalement sur l’éducation familiale. Aborder la littérature jeunesse nécessite une gradation : les albums complexes demandent à l’enfant de maîtriser un certain nombre de pré-requis. Par exemple, pour que le loup « revienne » avec Geoffroy de Pennard, il faut d’abord savoir qu’il est parti.
Avant, la situation des livres jeunesse dans les familles se décrivait en plein ou en vide : il y avait ou non accès à cette littérature. Aujourd’hui, il y a des livres dans la plupart des familles, mais il reste une forte disparité quantitative : entre 1 et 3 livres jeunesse dans les familles de certaines catégories sociales, opposés à plus de 300 dans des familles d’enseignants ou de bibliothécaires. Mais il y a surtout une différence qualitative : dans les familles « populaires », on trouve des albums dits « simples » (une trame narrative simple, un rapport texte - image redondant et un enchaînement narratif linéaire), patrimoniaux (contes) et parfois un abonnement à une revue enfantine. Dans les familles « cultivées », on retrouvera par contre à la fois des albums simples et des albums complexes.
Y aurait-il une fracture numérique à l’envers ? Des livres qu’on ne retrouverait que chez ceux dont les parents ont pu les apporter ?
Une chose est sûre : en France, 57% des élèves ont pour parent référent un ouvrier, employé, chômeur ou agriculteur. Si l’école ne fait pas découvrir la diversité des formes de lectures, ce n’est pas dans les familles que cela se fera.
Alors qu’en est-il à l’école ? On découvre encore des disparités. Au cycle 1, en ZEP, les albums utilisés sont principalement des récits de vie quotidienne qui sont surtout utilisés pour travailler le vocabulaire. Hors ZEP, dès le cycle 1, les enfants étudient les contes traditionnels, des contenus patrimoniaux forts. Ils font déjà de la littérature en cherchant les indices sémiotiques du texte et en en faisant des analyses simples. En ZEP, ces choses-là ne seront abordées qu'au cycle suivant. Au final, ce décalage se reportera tout au long de la scolarité.
Quelles solutions pour remédier à ce décalage ? Désormais, les enseignants de maternelle pourront s'appuyer sur une nouvelle liste d'ouvrages recommandés pour le cycle 1. Mais une telle liste est-elle vraiment suffisante ? Stéphane Bonnéry regrette qu'il n'existe pas (encore ?) une base de données dans laquelle les enseignants pourraient piocher pour exploiter au mieux ces ouvrages avec les enfants.

lundi 25 novembre 2013

Londres est à nous, mon p'tit poussin !


Que celui qui n'a jamais utilisé une vieille citation de Friends au hasard de la conversation me jette la première pierre... :)

Ces derniers temps, c'était un peu le bazar dans ma tête. Parce que trop de choses arrivaient en même temps. Parce que j'avais du mal à y croire. Mais après mon dernier aller-retour où j'ai réglé tout un tas de questions pratiques, les choses semblent peu à peu prendre substance et réalité.
Bientôt, je pars.
Le 5 janvier, précisément, je monterais de nouveau dans l'Eurostar, mais pour un aller simple cette fois. Et le lendemain, je commencerais à travailler dans une bibliothèque londonienne.

Trouver un emploi en Grande-Bretagne


Quand j'ai commencé à chercher du travail en Grande-Bretagne, je n'étais pas du tout convaincue qu'il soit possible de me faire embaucher, à distance, dans un pays étranger et un contexte économique peu favorable. Mais voici, je pense, quelques facteurs qui ont joué en ma faveur :
- Chercher un emploi qualifié pour lequel on peut faire preuve de compétences particulières (par exemple, pour les postes de magasiniers ça doit être beaucoup plus dur que pour les postes de niveau Bibas ou Bibliothécaire) ;
- Cibler l'enseignement supérieur, globalement plus protégé que les bibliothèques publiques ;
- Prouver son engagement en s'impliquant dans le processus de certification à l'anglaise (le fameux "Chartership") ;
- Faire le déplacement pour passer l'entretien en chair et en os (un billet dernière minute, ce n'est pas donné, mais c'est le meilleur investissement que j'ai fait jusque-là).

Le lendemain de l'entretien, quand j'ai reçu l'offre d'embauche, heureusement que j'étais assise. Les deux seules choses qui me sont passées par la tête, c'est "oh bon sang, mais qu'est-ce que tu as fait ?" et "il est encore temps de refuser..."
Comme un zombie, j'ai fait ma demande de mise en disponibilité pour convenances personnelles et je suis partie en vacances très loin.
La disponibilité, c'est très facile à demander, mais c'est assez long : mieux vaut avoir prévu large en expliquant à votre futur employeur que vous avez un genre de préavis de plusieurs mois à donner. Il suffit de faire une lettre de ce type-là et de la faire passer par voie hiérarchique (la donner à son n+1 qui fera passer au-dessus...). Si la direction est d'accord, c'est parti !
Pour info, j'ai reçu mon arrêté 6 semaines après avoir fait ma demande. Mais ça peut varier en fonction des administrations et la durée maximum légale est de trois mois.

Trouver un logement à Londres


Ayant reçu l'arrêté, je me suis dit que ça pourrait être une bonne idée de me trouver un logement, histoire de ne pas commencer l'année sous un pont (londonien, certes, mais tout de même !).
Vous étiez choqués par les prix de l'immobilier parisien ? Vous allez apprécier inénarrable marché londonien ! Les prix sont pires... Du coup, si vous partez en solo, la seule option viable, c'est la coloc. Vous aurez une chambre et vous partagerez votre salle de bain avec des inconnus pour le prix d'un F2 parisien ou d'une grande maison à Limoges...
Mais la bonne nouvelle c'est que, comme Londres est une ville horizontale, vous avez toutes vos chances de vous retrouver dans une maison avec jardin. (Oui, bon, ok, pas de blagues sur les jardins et le temps anglais, laissez-moi ça quand même !)

Je suis donc partie en quête d'un logement, glanant les petites annonces sur ce site-là, et programmant des visites pour ma petite virée londonienne de trois jours, la semaine dernière. (Disclaimer : le site que je mentionne a une version payante mais la version gratuite est largement suffisante, promis.)
Et je l'ai trouvée. La perle. Ma chambre. Dans une maison avec jardin, colocs sympas inclus. Et c'est là que j'ai commencé à me projeter un peu dans cet avenir si proche et si terrifiant. Mais avec du thé et des shortbreads.

Londres, c'est déjà un peu chez moi.


Licence Creative CommonsPhoto : prise par moi-même en novembre 2013 dans Hyde Park, Londres.
Ce texte et cette photo sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage à l'Identique 2.0 Générique.

vendredi 23 août 2013

Des twittothécaires Grands-Bretons

Voici un tout petit article pour vous suggérer deux ressources si vous voulez vous mettre à suivre sur  Twitter des bibliothécaires anglo-saxons.

Première possibilité, le président du CILIP, Phil Bradley, qui est très actif sur Twitter, a constitué une énorme liste de bibliothécaires britanniques. Vous pouvez la consulter ici et découvrir ainsi les flux de 1280 twittothécaires !



Deuxième possibilité via l'association Voices for the Library qui a lancé une projet de curation d'un compte Twitter. Chaque semaine, un nouveau bibliothécaire prend les commandes et partage son expérience et sa vision des bibliothèques. C'est toujours une expérience très riche et qui permet de découvrir des profils de bibliothécaires et de bibliothèques très différents.
A la base, il s'agissait surtout de bibliothécaires britanniques exerçant en lecture publique. Mais, de toute évidence, les règles sont faites pour être enfreintes puisque la semaine prochaine, je serais aux commandes !
Du coup, si le cœur vous en dit, je vous invite à venir jeter un œil à @VoicesLibrary.

mardi 30 juillet 2013

Veille : retours de concours

Je ne pense pas avoir jamais fait de billet de veille sur ce blog, mais il y a un début à tout. La saison des concours est venue et s'en est allée, laissant son lot de reçus et de presque-reçus parmi nos amis twittothécaires !
Alors voici un petit florilège d'articles de ces derniers mois contant les expériences des collègues aux concours des bibliothèques d'État, fournée 2013.


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Concours de Magasinier principal et Bibass


* Sur son blog, concours Kermitt reprend les sujets des écrits de cette année pour les concours de magasinier principal, Bibass classe normale et supérieure ainsi que les questions de son oral de Bibass classe normale.

Concours de Bibliothécaire d'État


* Après sa série d'articles sur ses qualités d'Exceptionnelle, Marie-Idille nous fait partager son expérience de concours de bib interne :
- L'écrit ;
- La lecture des résultats ;
- L'oral de culture générale.

* Cécile nous propose quant à elle une description très précise et factuelle des oraux de bibliothécaire.

* À ma connaissance, c'est le seul a être paru pour les concours de cette année : voici le rapport de jury 2013

Concours de Conservateur d'État


* Cécile ne s'étant pas arrêtée là, voici son retour d'expérience sur les oraux du concours de conservateur interne (avec pleins de bons conseils dedans).

* Et Mathieu nous propose une revue très complète de l'ensemble du concours de conservateur.

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J'avoue que j'ai lu tous ces billets avidement, avec autant de fascination que d'horreur... Je crois que je ne suis pas encore tout à fait prête à remettre le pied à l'étrier !
Ce qui me donne d'autant plus d'admiration pour les reçus, les presques-reçus, et tous ceux qui nous ont fait partager leur expérience sur leurs blogs ou sur Twitter. Merci à tous de nous avoir permis de vivre vos écrits et vos oraux par procuration. Vos témoignages seront, j'en suis persuadée, très précieux aux futurs candidats qui tremblent déjà à l'idée de bientôt s'inscrire pour la session 2014...

Si vous avez repéré d'autres témoignages concernant les concours d'État 2013, n'hésitez pas à m'envoyer les liens, je les ajouterais à ce billet.

mercredi 17 juillet 2013

Cilip, le Rebranding : la suite




Dans un premier épisode, je vous avais présenté le Cilip et expliqué le "rebranding-gate" secouant l'association. Voici la suite des évènements, tels que je les ai perçus à distance, au travers des déclarations du Cilip, des discussions sur Twitter et des articles des biblio-blogueurs britanniques.

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Le lundi 8 juillet, une assemblée générale du Cilip s'est tenue à Londres pour discuter la motion de Tom Roper demandant d'arrêter l'exercice de rebranding en cours :
“This General Meeting believes the current rebranding exercise should be halted, believing it to be a distraction from the urgent tasks of advocacy for the profession, and a waste of scarce resources.”
Une centaine de membres se sont retrouvés sur place pour un débat qui s'est avéré houleux, et apparemment plutôt en faveur des partisans de la motion.
Pour soupeser par vous-même les arguments des deux camps, voici le brouillon du discours que Tom Roper a fait lors de l'assemblée générale et voici un article de blog écrit par John Dolan sur le blog du président du Cilp, Phil Bradley, peu avant l'assemblée.
Nous avons pu suivre les débats en direct grâce à plusieurs live-twitters utilisant le hashtag #CilipGM (storifié ici, si vous voulez revivre l'action comme si vous y étiez !).


Néanmoins, de nombreux membres de l'association avaient pu voter "par proxy", en désignant quelqu'un, en général soit Tom Roper, soit Phil Bradley, pour voter en leur nom.
Les résultats ont ainsi été fortement dus à ces votes par procuration. Le décompte final dénombre 752 votes pour la motion, 804 votes contre et 16 abstentions.
Si le Cilip s'est immédiatement réjoui de ces résultats dans un communiqué de presse, Tom Roper, quant à lui, estime que les membres qui n'étaient pas sur place ont été mal informés des enjeux.

Le vote a été ressenti comme un choc et démontre une fois encore les dissensions que ce débat a créé au sein du Cilip : c'est presque un 50/50 parmi les votants, qui ne représentent néanmoins que 10% du total des membres. Ce qui a aussi beaucoup choqué c'est qu'au cours de l'assemblée, nous avons appris que les résultats du vote étaient "not binding" : jusque-là, les membres (qui se sont donc déplacés en nombre et se sont beaucoup impliqués dans le débat) ne savaient pas que leur avis ne serait que consultatif...

Au final, si le Cilip ressort vainqueur de ce vote, il a été véritablement affaibli par cette épreuve. Les débats ont porté les membres (en tous cas quelques membres très actifs sur les réseaux sociaux) à s'interroger quant à la structure même de l'association. Ian Clark, par exemple, estime que la procédure s'est avérée non démocratique, menée par le comité plutôt que par ses membres et a manqué de transparence. Mais il pense surtout que, ce sur quoi le Cilip et ses membres devraient se concentrer, s'est sur la réputation de l'association et non sur la marque "Cilip". Il faut que l'association, quelque soit son nom, agisse de façon efficace et éthique pour les professionnels qu'elle représente.

L'affaire du rebranding a aussi permis au Cilip de faire l'objet de petits articles dans la presse nationale britannique... mais sous un jour peu glorieux.

Quoiqu'il en soit, le rebranding continue : un nouveau nom sera proposé aux membres lors de l'assemblée du 21 septembre prochain avec pour objectif un lancement de la nouvelle marque en avril 2014.

Mais une prochaine affaire se profile déjà à l'horizon : des membres du Cilip demandent l'organisation d'un vote de défiance vis-à-vis du ministre en charge des bibliothèques, Ed Vaizey... À suivre !

mardi 25 juin 2013

Une question de vocabulaire



Comment traduiriez-vous magasinier ? Politique documentaire ? Notice d'autorité ?
Quand j'ai essayé de traduire mon CV en anglais pour la première fois, je me suis retrouvée comme deux ronds de flanc. Je ne pense pas être trop mauvaise lorsqu'il s'agit d'écrire en anglais, mais l'expérience m'a fait prendre conscience de l'énorme pan de vocabulaire professionnel qui me manquait. J'ai donc cherché sur Internet des ressources qui me permettraient de pallier ce manque et voici celles que j'ai trouvées.


* La ressource de loin la plus intéresse est ce Glossaire multilingue pour bibliothécaires de section Art trouvé dans les archives du site de l'IFLA. Bien qu'il contienne beaucoup de vocabulaire directement lié à l'art, il propose aussi de bonnes définitions et traductions de nombreux mots bibliothéconomiques plus généraux en français mais aussi en allemand, espagnol, italien, hollandais et suédois ! C'est vraiment une ressource très précieuse et indispensable.

* Ce glossaire en français avec traduction de termes en anglais proposé par l'université de Genève se penche plus précisément sur les termes liés à la recherche documentaire. Il est moins complet que le glossaire de l'IFLA mais il est plus lisible et les définitions proposées en français sont tout à fait claires.

* Ce lexique bibliothéconomique de la BPI propose la traduction de 1500 mots du français vers l'anglais, l'espagnol, le catalan et le tchèque. Le fichier est assez lourd, ce qui ralentit sa consultation, et j'émettrais quelques doutes quand à la traduction de certains mots. Mais il est facile d'y faire des recherches et cela reste une ressource utile.

* Enfin, quand je bute sur certaines expressions d'ordre plus général, j'aime à utiliser Linguee. Son moteur de recherche compare des millions de textes bilingues comme des documents officiels de l'Union Européenne ou des brevets. J'apprécie vraiment qu'il nous permette de voir les mots traduits dans leur contexte dans les deux langues. Mais il peut être mis en défaut si l'on cherche des mots professionnels trop précis.


Enfin, ce qui m'a vraiment aidée à mettre tout ce nouveau vocabulaire en pratique a été de lire et d'interagir avec des professionnels britanniques. Je lis leur équivalent du BBF (Cilip Update) les yeux grands ouverts, ce qui m'a permis de graver définitivement certaines expressions dans mon esprit (la fracture numérique ? C'est leur "digital divide"). J'ai aussi un énorme dossier de fils RSS pointant vers des biblioblogueurs britanniques que j'ai trouvés deci-delà (et qui pourront très certainement faire l'objet d'un prochain billet). Je les suis systématiquement sur Twitter et c'est un réel plaisir que de communiquer avec eux et d'observer à distance leurs échanges quotidiens.

Grâce à toutes ces ressources, j'ai vraiment l'impression d'avoir amélioré mon anglais professionnel. Mais il y a encore de nombreux mots sur lesquels j'ai des doutes. Peut-être auriez-vous des idées ? Je pense en particulier à la "veille", à "l'équipement" des documents ou à leur "exemplarisation" dont les traduction m'échappent.

Si vous avez des propositions de traductions, ou si vous souhaitez partager vos ressources favorites de vocabulaire bibliothéconomique, n'hésitez pas à les laisser en commentaire !


Licence Creative CommonsPhoto : prise par moi-même en avril 2013 à Paris.
Ce texte et cette photo sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage à l'Identique 2.0 Générique.

jeudi 6 juin 2013

Connaissez-vous le CILIP ?

EDIT: English-speaking readers stumbling on this blog? Here are my views on CILIP and its re-branding in English.

Le CILIP, un équivalent anglais de l'ABF ?

L'une des choses qui m'a le plus frappée quand j'ai commencé à explorer le monde des bibliothèques britanniques, c'est le pouvoir très important de cette association tentaculaire qu'est le CILIP. En gros, il s'agit de l'ABF local. Enfin presque.

"CILIP" signifie "Chartered Institute of Library and Information Professionals" (institut certifié des bibliothèques et professionnels de l'information). Il a pour sous-titre "the leading professional body for librarians, information specialists and knowledge managers" (le corps professionnel principal des bibliothécaires, spécialistes de l'information et knowledge managers).

Le mot "Chartered" mérite qu'on s'y arrête un instant. Cette "certification" est une particularité des pays du Commonwealth. Il s'agit d'un statut officiel attribué par le monarque via un document formel, le "royal charter". Le statut de "chartered" donne à l'institution prestige et crédibilité. Ces institutions peuvent ensuite attribuer un statut de "chartered professional" à certains de leurs membres en reconnaissance de leur niveau de connaissance dans un domaine professionnel particulier.

C'est le cas du CILIP, qui décerne différents niveaux de certificat : "Certification" pour les assistants bibliothécaires, "Chartership" pour les bibliothécaires, "Fellowship" pour les membres "Chartered" de haut niveau et "Revalidation" pour les membres démontrant la continuité de leur développement professionnel. Ces certificats semblent vraiment une étape importante dans la vie professionnelle des bibliothécaires anglais, comme en témoigne notamment les nombreuses petites annonces précisant que le poste publié est réservé aux "Chartered librarians".

Le CILIP s'occupe aussi de gérer une base de petites annonces  incontournable pour qui cherche à travailler dans le secteur, propose un programme d'échange international, publie un journal professionnel, gère sa propre maison d'édition, et anime un groupe parlementaire. Cette liste est loin d'être exhaustive : les activités du CILIP sont très diverses et ses membres extrêmement actifs et passionnés. Ce que j'ai pu découvrir en tombant tête la première sur le grand débat en cours dans l'association...

Le rebranding-gate

Récemment, le CILIP s'est largement remis en question et a dû se réorganiser entièrement afin de rééquilibrer son budget. Ça a été pour l'association l'occasion d'un examen de conscience et d'interroger ses membres sur les orientations qu'ils souhaitaient voir prendre au CILIP. Dans un contexte de coupes budgétaires et de fermetures de bibliothèque, l'un des mots qui est revenu était "advocacy". Le CILIP se doit de se faire la voix et de défendre les intérêts des professionnels de l'information et des bibliothèques.

Or, l'un des problèmes qui s'est fait jour concerne l'identité du CILIP. Vous ne connaissiez pas cet acronyme ? Et bien la plupart des citoyens britanniques non plus. En 120 années d'existence, le nom de cette association a changé à plusieurs reprises et il semble que ce dernier choix n'ait pas été des plus heureux. Le déroulé du nom est incroyablement long ("Chartered Institute of Library and Information Professionals"), et semble être devenu un véritable obstacle dans des temps où une communication claire se fait de plus en plus pressante.

Les instances dirigeantes ont donc décidé de lancer un grand chantier de "rebranding" pour modifier le nom, le logo et les visuels de l'association. Par un mail daté du 24 mai, le CILIP invitait ses membres à participer à un sondage afin d'exprimer leur avis. Et ce fut un tollé.

Le principal objet du délit : les cinq nouveaux noms proposés au vote.


Un déluge de réactions s'en est suivi, en particulier sur les réseaux sociaux. Un très grand nombre de membres étaient choqués de ne retrouver les mots "library" ou "librarian" nulle part dans les propositions. Enfin pas tous. Certains se sont trouvés heurtés qu'aucune proposition ne contienne le statut "Chartered" dont nous parlions plus haut. D'autres auraient simplement voulu proposer leur propre acronyme. Une membre a soulevé que, globalement, les questions étaient assez orientées, demandant surtout d'acter ce que le CILIP voudrait être sans vraiment s'interroger sur ce qu'il est en réalité.


Le président du CILIP s'est lui-même exprimé face au tumulte, rappelant qu'il ne s'agit que d'un sondage et non d'un vote, expliquant qu'il n'avait pas été consulté quant à son contenu et soulignant que la décision finale serait prise par les membres au travers d'un vote en septembre prochain. Il réitère aussi dans cet article l'importance pour le CILIP de pouvoir se faire entendre clairement et d'être facilement identifiable dans les débats publics.

Ce n'est pas l'avis de Tom Roper. Surfant sur le mécontentement global soulevé par le sondage, celui-ci s'est lancé dans une croisade agressive contre cet exercice de rebranding qu'il juge être une perte de temps et de ressources, requérant par pétition une assemblée générale exceptionnelle afin de mettre la question aux voix. Il a rapidement pu rassembler les 100 signatures nécessaires et l'assemblée en question se tiendra le vendredi 28 juin prochain.

Entre temps, le CILIP a proposé à ses membres, par un e-mail daté du 5 juin, un nouveau sondage, leur demandant cette fois de suggérer des idées de nom.

A suivre donc.


Licence Creative Commons 
Ce texte et cette photo sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage à l'Identique 2.0 Générique.

mardi 28 mai 2013

CultureBib #3 : Art, douceur et émotion

Il est parfois de ces personnes passionnantes et passionnées qui ont une telle volonté de partage qu'elles savent vous donner l'envie de suivre la voie qu'elles ont tracé pour s'émerveiller avec elles devant leurs dernières découvertes. C'est le cas de Magali Lauret, ancienne collègue passée à l'ennemi (ce sont désormais les lecteurs d'une bibliothèque territoriale d'Ile-de-France qui profitent de son énergie et de sa gentillesse)...
 Nous nous retrouvons régulièrement devant un quelconque prétexte culinaire pour des discussions éclectiques mais souvent littéraires. Or, elle sait parler avec tant de verve de ses dernières rencontres culturelles, découvertes dans sa pratique personnelle, dans son travail d'acquisitions ou au travers du club de lecture qu'elle anime, que je repars systématiquement avec une liste immense de choses à lire de toute urgence ! Alors, sans plus attendre, voici ses propositions pour cette troisième édition de #CultureBib.

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- Un livre : 

Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants, Mathias ENARD

Résumé : 1506 : Michel Ange débarque à Constantinople à la demande du sultan Bajazet afin de réaliser un pont sur la Corne d’Or. S’emparant de ce fait historique avéré, l’auteur construit un récit autour de ces quelques mois oubliés de l’histoire. Un véritable portrait de « l’artiste au travail » est dressé, on suit Michel Ange au gré de son inspiration, ses doutes, ses découvertes, mais aussi de sa belle amitié avec le poète Mesihi.

Mon avis : un livre empreint de mystères, de nostalgie, d’art et de beauté, ce roman nous transporte dans un univers oriental fascinant, qu’on quitte à regret.

=> Prix Goncourt des lycéens en 2010

- Un CD : Petite découvert sympa de cette année (ah le privilège de bosser en bibli ;-)

It will all come around, FM Laeti

Un cd qui s'écoute à tout moment de la journée, une jolie voix, que du bonheur !

- Un film : Là c'est dur d'en choisir un, j'en vois pas mal que je prends régulièrement à la bibli. En voilà un qui m'a marqué :

Va, vis, deviens, réalisé par Radu Mihaileanu en 2005.

Un film beau et émouvant qui fait réfléchir, servi par de bons acteurs.

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Je compte sur vous pour faire comme moi et vous précipiter sur les rayons de votre bibliothèque de proximité... Pour ensuite venir parler de ces documents sur le mot-croisillon #CultureBib.
Quelques liens pour les nouveaux venus :
N'hésitez pas à m'envoyer vos propositions de choses à lire / à voir / à écouter :  ma boîte mail est grande ouverte ! ... J'ai mentionné que les participants auraient des gâteaux ? ... Quoi, oui, c'est de la corruption éhontée, j'assume ! :)

vendredi 17 mai 2013

Je suis venue vous dire...


Certains l'auront déjà vu sur Twitter : je viens d'ouvrir un deuxième blog, un blog-frère de celui-ci, un blog en anglais. Pourquoi ? Parce que j'ai envie, j'ai besoin de raconter une histoire. Une histoire qui m'exalte et qui me terrifie, une histoire que je veux partager quelqu'en soit l'issue : j'ai décidé d'essayer de partir travailler en Grande-Bretagne. Je ne sais pas encore vraiment comment, ni même si j'y parviendrais vraiment, mais en tout cas, j'ai décidé d'essayer.

Du point de vue du blog, que va-t-il se passer ? Et bien, si ça vous tente, je vous raconterais un peu mes découvertes et mes déconvenues. En particulier, toutes ces différences que je relève peu à peu entre nos pratiques des deux côtés de la Manche.
Le blog en anglais, And Books Will Fly, ne sera pas une copie conforme de celui-ci. Il va néanmoins reprendre le contenu de certains de mes précédents articles, mais essaiera aussi de raconter à de potentiels lecteurs britanniques comment ça marche ici, le monde des bibliothèques. D'ailleurs, si vous avez des suggestions, je suis preneuse !
Bref, je le veux comme un exercice de réflexion autant qu'un exercice de style (et là, je dois avouer que ça me démangeait depuis longtemps d'avoir l'occasion de travailler ma rédaction anglaise).

Du coup, je voulais juste vous prévenir de ne pas vous étonner si, dans les semaines à venir, je me mets à vous parler du CILIP, de chartered librarians ou d'equal opportunities. Ce n'est que mon cerveau qui pédale pour se dépêtrer dans toutes ces étranges anglaiseries...

Licence Creative CommonsPhoto : prise par moi-même en juin 2012 à Londres.
Ce texte et cette photo sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage à l'Identique 2.0 Générique.

mardi 14 mai 2013

L'apprentissage en ligne, nouvelle édition : les MOOCs



Il y a quelques mois, mon cher Papa, fidèle à l'une de ses plus anciennes habitudes de curateur qui s'ignore, m'a refilé un vieux numéro de Courrier International grand ouvert sur une page dont il pensait qu'elle pourrait m'intéresser. Je lui avais parlé quelques jours plutôt des cours vidéos que je suivait sur YouTube et l'article en question traitait des MOOCs.

Ahahah. Ahah. Ah.
Comme souvent, il s'avérait que j'avais bien deux trains de retard. Et que mon père en avait deux d'avance. La routine habituelle.

Bien décidée à monter à bord du bon train cette fois, je suis allée visiter tous les liens mentionnés par l'article, les yeux grands ouverts et emplis d'étoiles. Amis en quête de savoirs, ne cherchez plus : les plus grandes universités du monde nous ouvrent leurs portes. 
Pour ceux qui, comme moi, n'ont pas suivi, les MOOCs sont des Massive Open Online Courses, soit des cours en ligne ouverts et massifs, proposés par de grandes universités d'un peu partout (mais surtout américaines). Plus que de simples vidéos en ligne, ils veulent se rapprocher de l'ambiance « fac », ayant une date de début et de fin, des deadlines à respecter pour rendre les devoirs et une volonté d'être le plus interactif possible.


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Après avoir brièvement comparé l'offre en la matière, j'ai opté pour un cours de « Songwriting », sur la plateforme Coursera, afin de tester le concept. Le principe est simple : une simple adresse mail suffit pour s'inscrire et accéder aux leçons. 
A date fixe, les vidéos du cours de la semaine - découpé en plusieurs sessions de dix ou quinze minutes - sont mises en ligne (et en HTML5, je vous prie). Des petits quizz intra-vidéo permettent de vérifier qu'on a bien compris les concepts importants. 
Certains cours s'appuient aussi sur la lecture de quelques documents, parfois facultatifs, parfois obligatoires (vous imaginez bien que les cours de littérature vont vous demander de lire quelques bouquins !). Mais souvent, l'accès aux sources est facilité. J'ai notamment en tête un cours sur le leadership qui donne accès aux étudiants, soit directement sur le site de l'éditeur, soit via des pdf à télécharger, à des articles scientifiques qui ne sont pas en Open Access (et bien souvent... le professeur fait partie des auteurs... tiens, tiens...).

Les étudiants peuvent échanger remarques et conseils sur des forums (mais quand on sait qu'au début d'un cours donné, environ 50 ou 60 000 personnes sont inscrites... c'est parfois un peu dur de se faire entendre !). 
Apparemment, les profs, leurs assistants et le staff technique de Coursera suivent de plus ou moins près les échanges. Certains interviennent directement sur le forum, d'autres multiplient les annonces par mail pour répondre aux remarques et questions les plus populaires. Le professeur de psychologie du cours que je suis en ce moment semble vraiment très investi dans le projet et crée régulièrement de nouvelles vidéos pour répondre aux débats qui font rage entre les étudiants.

Enfin, on a droit à de bons vieux examens à l'ancienne, soit sous la forme de questionnaires à choix multiples, soit d'essais (ou dans le cas de quelque chose de moins traditionnel comme le cours de « songwriting », de paroles de chansons ou d'extraits musicaux). 
Les modalités de notation varient d'un cours à l'autre. Ce cours de management par exemple, valorise la participation et demande d'écrire un minimum de 20 posts sur le forum (avec les excès que cela peut comporter : une myriade de sujets sans intérêt ou de répétitions, surtout les premières semaines). Certains essais ne nécessitent qu'un minimum de 100 mots pour obtenir automatiquement la note maximale. D'autres font appel à du peer review : chaque semaine, chaque étudiant évalue au moins cinq devoirs afin que chacun puisse avoir une chance de recevoir des retours intéressants. J'avoue que c'est bien là ma méthode d'évaluation préférée : j'ai vraiment l'impression que c'est en essayant d'évaluer le travail d'un autre qu'on prend toute la dimension des notions qu'on est censé avoir acquises. Et j'ai reçu quelques vraies reviews emplies de conseils avisés.

Au final, on a droit à un joli diplôme virtuel attestant de notre participation et de notre réussite. Certains cours proposent même (moyennant finance) de faire valider plus officiellement votre participation afin de pouvoir la valoriser d'un point de vue professionnel. Mais, à mon humble avis, l'intérêt est surtout dans le plaisir d'apprendre de nouvelles choses dans un cadre bien délimité, interactif et motivant.


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Bref, les MOOCs c'est bon, mangez-en. Si vous avez l'âme un tant soit peu scolaire, ou que vous êtes simplement avides de connaissances, vous allez vous régaler. Autant vous dire que j'ai rempilé tout de suite sur trois nouveaux sujets et que mon calendrier et plein jusqu'à l'année prochaine...

Pour finir, voici une petite collection de cours qui seraient peut-être susceptibles de vous intéresser. Amusez-vous bien !
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PS : je suis toujours preneuse si vous avez des suggestions pour #CultureBib... Je n'ai qu'un nombre fini de collègues susceptibles d'être soudoyés à coups de madeleines... Alors si on veut que ça continue, il va me falloir des curateurs volontaires ! Promis, si on se croise sur Paris ou ailleurs, je vous ferais des gâteaux...


Licence Creative CommonsPhoto : prise par moi-même en avril 2013 dans les jardins du palais impérial de Tokyo.
Ce texte et cette photo sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage à l'Identique 2.0 Générique.

vendredi 29 mars 2013

Evaluer la bibliothèque - Salon du Livre 2013


Encore cette année, j'ai pu assister à quelques conférences données à l'occasion du Salon du Livre 2013. Je vous retranscris ci-dessous celle qui m'a parue la plus intéressante parmi les quelques unes dont j'ai été témoin. Notez bien néanmoins, qu'il s'agit d'une retranscription à partir de mes notes : certains intervenants parlaient assez vite et l'ensemble des communications étaient denses. J'ai donc fait mon possible pour noter le plus de choses possibles, mais les phrases reproduites ci-dessous ne sont pas exactement celles qui ont été prononcées par les intervenants. J'espère néanmoins leur être restée relativement fidèle.

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Evaluer la bibliothèque


Les intervenants :

Valérie Alonzo, adjointe à la direction de la Bibliothèque interuniversitaire Cujas
Pierre-Yves Renard, directeur du Bibliopôle (réseau de lecture du conseil général du Maine et Loire)
Iegor Groudiev, responsable de l’Observatoire de la lecture publique
Animé par Martine Poulain, directrice de la bibliothèque de l’INHA
Valérie Alonzo et Pierre-Yves Renard ont co-dirigé l’écriture du livre Evaluer la bibliothèque, paru en décembre 2012 au Cercle de la Librairie. C'est à l'occasion de cette parution qu'était organisée cette rencontre.

Intervention de Valérie Alonzo :

Aujourd’hui, il y a consensus sur la nécessité de l’évaluation en bibliothèque. On a observé un essor récent lié à l’évolution de l’environnement institutionnel.
Il existe un aspect idéologique. Le fait qu’on aboutisse à des indicateurs chiffrés donne une impression d’objectivité. L’évaluation des politiques publiques se faisait auparavant dans un contexte d’aisance budgétaire et d’un gouvernement socio-démocrate. Elles avaient pour objectif des politiques publiques mieux adaptées, organisées par des organismes centralisés. Aujourd’hui, nous sommes plutôt dans un contexte de restrictions budgétaires et de gouvernement plus conservateur, il s’agit plutôt de justifier et de guider les réductions de budget.
L’essor qu’a connu l’évaluation des bibliothèques s’est fait plutôt dans ce contexte. Mais il ne s’agit pas seulement d’une aide à la prise de décision mais aussi de montrer les capacités de l’Etat à mener des politiques publiques.

D’autre part, le niveau d’intervention a changé. La décentralisation n’est certes plus une nouveauté du coté de la lecture publique. Mais le phénomène a fait une apparition plus récente en bibliothèque universitaire du fait de la LRU. Ses effet ont inclus des démarches de contractualisation, un questionnement des objectifs au niveau local comme national, etc. On fait face à une pluralité d’acteurs : décideurs locaux, usagers, instances d’évaluation et de contrôle. La contractualisation a entraîné une segmentation : les contrats se font sur des objectifs ciblés. En bibliothèque universitaire, on divise les étudiants en catégories (les licences, les élèves en difficultés, etc.). Les bibliothèques doivent se distinguer les unes des autres : elles proposent donc de nouveaux services, répondent à des demandes ciblées qui font donc l’objet d’indicateurs morcelés.

Les travaux à mener se complexifient : alors quels indicateurs pour mesurer le portrait des bibliothèques ? Il faut interroger ses objectifs. Il faut adopter plusieurs points de vue (le citoyen, l’usager, le contribuable) et la réponse à ces demandes ne se fait pas de la même façon. Les incertitudes quant aux missions se traduisent par un travail se recentrant sur la satisfaction des utilisateurs. On va donc faire des mesures de coût et d’impact pour arriver à se comparer dans le temps et avec d’autre (benchmarking).
La comparaison dans le temps se fait depuis un moment via l’utilisation de tableaux de bord. Cela permet d’observer les évolutions et de fixer des objectifs à atteindre.
Le benchmarking pose des questions méthodologiques du fait de l’hétérogénéité des données et des établissements. Il est effectué le plus souvent au niveau national car il est plus facile de savoir ce que l’on compare. La collecte au niveau national de ce type de données est connue et l’on dispose d’un réservoir de statistiques important et sur le long terme, ce qui est très utile pour dégager des synthèses et chercher des informations à la source de manière fine.
Les comparaisons internationales sont importantes mais plus difficiles. Il s’agit de montrer des tendances, de chercher des pistes d’évolutions.

Dans le cas d’une démarche qualité, on va retrouver la question de l’usager. On y a souvent recours dans le cadre d’une volonté de diagnostique de la fonction d’accueil (sur lesquelles les bibliothèques travaillent de plus en plus). Elle répond à une ambition d’amélioration des services.
La Charte Marianne est beaucoup utilisée dans les collectivités locales. Elle est souvent mise en place par ce biais en bibliothèque. Elle a été déclinée en une boîte à outils : Qualibib. Il s’agit d’une bonne introduction à la démarche qualité, proposant des exemples très concrets sur ce qui peut être mesuré.
La BnF, la BPI et les BU se la sont appropriée. Un accélérateur a été mis en place par la DGME.
Les enquêtes de publics existent depuis très longtemps en BM. Elles sont surtout intéressantes si elles sont mises en place régulièrement. Il faut ensuite communiquer auprès des publics à la fois les résultats de l’enquête et les démarches ensuite mises en place.
En BU, leur utilisation a augmenté avec l’arrivée de LibQual+, enquête américaine transposée en France. Cette enquête insiste beaucoup sur la satisfaction telle qu’elle est perçue par le public, ce qu’il pense.
Les enquêtes se sont développées sous la pression institutionnelle et en réponse à des constats alarmants ou alarmistes sur la baisse de fréquentation des bibliothèques, l’utilisation des documents en ligne.

La recherche est l’expérimentation concernant le coût et l’impact des bibliothèques est une entreprise délicate. Des travaux sont en cours au niveau international pour aboutir à des normes AFNOR / ISO.
Combien coûte un prêt ? Combien coûte un utilisateur ? Pourquoi voudrait-on mesurer ça ? Beaucoup de moyens sont déployés pour mesurer l’impact, mais à quoi cela sert-il ? Il s’agit d’adresser les missions de la bibliothèque. D’un point de vue social, on va étudier l’impact sur les utilisateurs (l’utilisation de la bibliothèque permet-elle un changement de comportement, de connaissances, de compétences ?) mais aussi sur les communautés (en quoi la présence de la bibliothèque est-elle valorisante pour la communauté ?). Des travaux sont en train d’être menés au sein de l’IFLA et notamment sur des retours d’expérience nord-américains.
La valeur de la bibliothèque peut se traduire en valeur monétaire pour des services tels que la formation à la recherche documentaire ou la fourniture de documents.

Il est de plus en plus difficile de dresser le portrait des bibliothèques. Elles sont très dynamiques et ont beaucoup d’atouts. Les bibliothèques possèdent déjà une tradition d’échange sur les pratiques et de retours d’expérience. La question reste posée quant à la sélection des indicateurs : il faut qu’ils permettent de répondre à des politiques ciblées tout en permettant d’obtenir une vision générale des bibliothèques.
La question de la temporalité doit prendre en considération la possibilité de mettre à jour la communication interne et externe de la bibliothèque. Elle peut suivre le rythme de l’année budgétaire ou des mandats des élus dont dépend la bibliothèque.
La définition des indicateurs doit répondre à la question : que cherche-t-on à mesurer ? Sur le sujet, des normes internationales sont en cours de révision.

Intervention de Pierre-Yves Renard :

Le nom « Bibliopôle du conseil général » met en avant le commanditaire, souligne son intervention. On est toujours tiré entre la satisfaction du public et la satisfaction des missions assignées par la puissance publique. C’est sur ces dernières qu’on possède le moins d’éléments.
L’évaluation peut se faire à la fois en interne et entre bibliothèques. Il existe pour cela des outils et des concepts. Mais l’évaluation change-t-elle la bibliothèque et sa façon de fonctionner ? Il s’agit là de l’étape suivante de réflexion.

L’évaluation prend parfois l’aspect d’un affreux spectre managérial. Le livre dont la publication a donné lieu à ce débat a pour objectif de donner aux bibliothécaires les connaissances nécessaires pour savoir comment jouer ce jeu.
En France, il n’existe pas d’exemple d’une structure pilotée principalement par l’évaluation. Les outils et les méthodes viennent surtout de la sphère privée qui a pour objectif la maximisation du profit. L’évaluation est toujours marquée par cette origine, il n’existe pas d’outils complètement adaptés. Dans le contexte actuel de restrictions budgétaires, l’évaluation garde cette orientation.
Il existe un problème de maturité de l’organisation publique. La commune, le département raisonnent-ils aussi sur l’évaluation de manière aussi avancée ? Les responsables ne sont ni recrutés ni sanctionnés vis-à-vis d’objectifs atteints ou non. Il y a des intentions mais pas d’explicitation. Or évaluation dit explicitation : on met des chiffres sur des activités, on voit comment cela fonctionne.
Les établissements n’ont pas toujours d’idées très claires quant à leurs objectifs à atteindre. C’est moins le cas en BU (par exemple : « soutenir la réussite en licence ») mais cela reste assez flou en lecture publique (par exemple : « toucher le plus grand nombre »). On reste donc à la surface des choses, on ne va pas au bout de la logique d’évaluation. La responsabilité de cet état de lieux va aux bibliothèques mais aussi aux élus qui ne sont pas toujours explicites dans leurs demandes.
En contre-exemple, on peut nommer la bibliothèque de Mississauga, au Canada. Elle fait l’objet d’un processus d’efficacité organisationnelle comprenant un management annuel, un plan stratégique sur trois ans avec un dialogue sur les objectifs et les moyens avec la municipalité, un processus d’organisation du workflow. Au final, 50% de la population de la ville est inscrite à la bibliothèque.
Qu’est-ce que mesurer le succès ? C’est se confronter aux intentions des bibliothèques et non à leurs moyens, à leurs voisins ou aux établissements plus riches.
Il n’y a pas de maturité complète du processus d’évaluation dans les bibliothèques française. Dans les démarches d’évaluation, le plus intéressant n’est pas le résultat mais le processus.

Les BDP sont des relais pour l’évaluation car elles touchent un grand nombre de points d’accès au livre. Sur le réseau du Maine et Loire, une démarche a été engagée : la commune doit mettre un certain nombre de moyens pour que le Bibliopôle puisse intervenir. Dans ce dialogue avec les élus, l’évaluation est un levier qui a permis de faire avancer les choses. Le service a augmenté via cette démarche évaluative et non via les résultats de l’évaluation.  L’évaluation peut être un vecteur de succès en bibliothèques en permettant de demander des moyens.

Transition de Martine Poulain :

L’évaluation permet de poser des objectifs et des sous-objectifs situés dans le temps, ce qui n’est pas assez fait en bibliothèque. Mais ces objectifs peuvent aussi s’avérer différents voire contradictoires en fonction des différents types de bibliothèques, même au sein d’un même réseau.

Intervention de Iégor Groudiev :

L’ambition du ministère de la culture est de repenser le dispositif de statistiques concernant les bibliothèques. Cela concerne le pilotage national mais aussi la mise à disposition d’un outil pour se mettre dans une démarche d’évaluation à tout niveau en lecture publique. Certains établissements ont peu de moyens techniques et financiers à y consacrer. Le ministère cherche à répondre à ce type de besoins au travers d’un dispositif pouvant convenir à tous les échelons.
L’outil de collecte est un formulaire comportant plus de 400 items. L’objectif était de créer un espace de saisie convivial ; néanmoins, les données restent complexes à collecter.
Un nouveau site à vu le jour : l’observatoire de la lecture publique. Il propose des outils permettant de connaître l’état national, l’historique des indicateurs et la démarche d’évaluation établissement par établissement.
L’an dernier la synthèse sur le site était très détaillée. D’ici avril,  la synthèse 2011 sera mise en ligne, avec une analyse du point de vue national et quelques extrapolations en valeur absolue. Cette synthèse est très dense et les aspects méthodologiques sont très développés.
Un outil cartographique sera mis à disposition afin de consulter les données sur l’ensemble du territoire français à toutes les échelles. Il sera possible de comparer (notamment pour faire du benchmarking), de voir la structuration des équipements. Il y aura pour chaque commune un rapport statistique détaillé mis en regard de données démographiques et d’éléments spécifiquement bibliothéconomiques.
Si cette synthèse ne se substitue pas à une démarche d’évaluation locale (elle ne prend pas en compte les besoins spécifiques de la tutelle), elle peut néanmoins, en particulier pour les petites structures, permettre de croiser les éléments, d’avoir un retour sur les données remplies pour les statistiques nationales.
Le dispositif est en cours de mise en place. Il fait l’objet d’un partenariat avec les conseils généraux et les BDP : un tiers des départements français sont pour l’instant couverts mais l’on espère atteindre l’exhaustivité pour l’an prochain.

Discussion

Martine Poulain : Avant, l’optique géographique prenait le pas sur les données par établissement.
Iégor Groudiev : Désormais, le rapport circonstancié de l’année en cours et de l’ensemble des années précédentes ayant été saisies par l’établissement sont exportables en PDF.
Pierre-Yves Renard : le rôle des BDP est d’assister les communes les plus petites dans le remplissage des statistiques. L’observatoire de la lecture publique devrait permettre d’obtenir des retours particulièrement intéressants car on manquait de données sur ces toutes petites bibliothèques.
Iégor Groudiev : Le ministère de la culture a pour vocation de traiter les données provenant des bibliothèques qui dépendent de son périmètre historique. Certes, dans certaines communes, le CDI fait office de bibliothèque municipale. Mais la tâche ici est déjà considérable sans prendre en plus en compte ce genre de cas.
Valérie Alonzo : L’apport interne de l’évaluation va se faire lors du travail sur la procédure. Il faut qu’il y ait une transmission du travail effectué, qu’il y ait collaboration. L’évaluation va pouvoir impacter la politique documentaire et le travail sur les collections.

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Les autres conférences que j'ai pu retranscrire sur ce blog :