lundi 11 juin 2012

Jeux de langues




J'ai beaucoup râlé quand la réforme a fait devenir obligatoire une deuxième langue au concours de conservateur d'État. Il me semblait, et j'en suis encore convaincue, que la mesure réduisait encore les possibilités d'admission des candidats aux profils atypiques (plus de notes de synthèses différenciées, plus d'oraux scientifiques ou juridiques). Selon les autorités compétentes, les précédentes épreuves n'avaient pas permis de recruter des spécialistes. Ces modifications des épreuves ne restreigne-t-elle pas d'autant plus les possibilités de leurs recrutements ? Ne vont-elles pas seulement servir à reproduire encore un peu plus fidèlement les profils littéraires étriqués qui tendent à constituer le corps des conservateurs ? Au final, qui peut triompher de ce concours ? Combien d'entre nous peuvent se targuer d'être trilingue ?


Pourtant, je ne suis pas la plus mal lotie. Si en 2007, la version anglaise avait déjà disparu pour se transformer en épreuve orale, je n'aurais jamais eu la chance d'expérimenter les revers de l'admissibilité. Mais maintenant que les sujets de langues deviennent les supports à des prestations orales ne valant que pour l'admission, je reste assez sceptique quant à mes chances d'un jour les réussir.
Donc, alors même que j'ai retourné ma veste pour ne plus réviser directement les épreuves de ces chers concours, je profite d'une partie du temps que je me suis ainsi dégagée pour reprendre un peu mon allemand rouillé, mon faible italien, mon japonais si frêle qu'un coup de vent le ferait tomber par la fenêtre. C'est qu'en fait, j'aime bien les langues. Alors si un jour elles pouvaient m'aider un peu face à un jury ou au bas de mon CV... C'est toujours ça de pris.


A mon sens, l'apprentissage d'une langue, c'est un peu comme une grille de mots-croisés infinie, un sudoku de l'extrême, un amusement de l'esprit. J'aime à faire ainsi tourner mes méninges, pas tant pour la compétence finale que pour le plaisir du parcours. J'y vais par petits à-coups, quand soudain ça me prends, pour occuper quelques heures de train, pour m'empêcher de penser à autre chose. Puis je laisse en jachère. Je commence autre chose. Une autre langue, un nouvel instrument, un projet différent. Et toujours j'y reviens, ravie de voir que les mots me glissent sur la langue, me reviennent à l'esprit plus aisément que la dernière fois.
J'aime à synthétiser les choses, rédiger toujours plus clairement, réduire l'équation à son expression la plus simple, traduire sans fioritures. L'exercice est plaisant et me désencombre l'esprit. Je ne suis toujours pas convaincue de ce que la réforme de 2007 aie vraiment été judicieuse, mais qu'y faire, si ce n'est tenter de faire avec, du mieux que nous puissions ? Voyons les choses du bon côté : au final, la traduction ne s'apparente-t-elle pas à un genre de catalogage très élaboré ?

Licence Creative CommonsPhoto : prise par moi-même à Andilly en juin 2011.
Ce texte et cette photo sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage à l'Identique 2.0 Générique.

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